Livre Métier réalisation sous la direction de Bruno Carrière
Proposer une seule définition de la réalisation serait un exercice aussi futile que de dire qu'il n'y a qu'une seule façon de faire du pain. Les textes et les entretiens que nous vous proposons le confirment: le métier de la réalisation en est un de diversité et de polyvalence.
Vous trouverez ici des repères et de nombreux dénominateurs communs. Mais, ensuite, les nuances s'imposent. En matière de réalisation, interviennent tous les aspects de la personnalité, de la subjectivité et du
talent de chacune et de chacun. Voilà pourquoi il existe autant de définitions que d'individus.
Les réalisatrices et les réalisateurs sont là pour témoigner, avec leurs oeuvres, que liberté et diversité sont les ingrédients indispensables d'une création originale et dynamique. Quel qu'en soit son format, l'écran est la toile du créateur d'images, la surface sur laquelle il transpose sa façon de voir le monde.
Il faut parcourir ce livre pour constater à quel point les participants éprouvent un même plaisir à nous parler de leur pratique. Leurs propos, qui mêlent récits de tournages, points de vue esthétiques et techniques de travail, dressent un panorama unique d'un métier qui est au coeur de l'industrie québécoise du cinéma et de la télévision.
Avec des textes de :
Denys Arcand, Paule Baillargeon, Philippe Baylaucq, Bernard Emond, Christopher Hinton, Jean-Daniel Lafond, Jean Pierre Lefebvre, Dany Laferrière, Patrice Sauvé.
Et des entretiens avec :
Manon Barbeau, Louis Bélanger, Charles Binamé, Martine Chartrand, Louis Choquette, Helen Doyle, Robert Favreau, André Forcier, Sylvie Groulx, Magnus Isacsson, Micheline Lanctôt, Nicola Lemay, Catherine Martin, Robert Morin, Benoît Pilon, Léa Pool, Michel Poulette, Jean-Marc Vallée.
Bon visionnement!
Voici quelques extraits d’entrevues du livre Métier réalisation publié sous la direction de Bruno Carrière :
« Le réalisateur est un passeur, un rêveur, fier de l’être. Ouvert aux réalités extérieures tout en restant fidèle à sa vision intérieure, il contribue à multiplier les visions du monde. Au contraire d’une vision monolithique, c’est une vision plurielle et kaléidoscopique qui s’ouvre alors à tous ; c’est ça l’âme du cinéma. Lorsque cette dimension réellement démocratique et universelle est évacuée, ce n’est plus du cinéma, c’est de la production. »
— Philippe Baylaucq
« Tantôt on disait que je faisais des documentaires, mais moi je pense que je fais du cinéma. J’aimerais bien qu’il n’y ait pas de dichotomie ou de frontières entre la fiction et le cinéma, mais que du cinéma, comme une forme d’expression la plus personnelle possible. (…) On se raconte un peu nous-mêmes, on raconte un peu les autres, on raconte un peu la vie et on raconte avec des images et des sons. Alors tout ce qu’on est et tout ce qu’on fabrique devrait s’appeler cinéma. »
— Manon Barbeau
« C’est l’amitié qui m’a amené à la réalisation. Quand j’étais p’tit cul, je m’intéressais au cinéma, mais je voulais devenir journaliste. Je suis débarqué à Montréal pour étudier en journalisme. Mon professeur, Pierre Bourgault, m’a dit : « Tu n’es pas intéressé à raconter la vérité. Tu veux raconter des histoires, donc journaliste, c’est peut-être pas la bonne avenue pour toi. »
— Louis Bélanger
« On débarque de nulle part et on croit que c’est de plus en plus facile de faire du cinéma maintenant, on n’a qu’à avoir une petite caméra numérique, on se promène sur la rue, tout le monde peut faire un cadre. Mais alors tout le monde peut écrire aussi. (…) Un réalisateur qui débarque le premier jour avec un acteur devant lui puis qui doit donner une indication est mieux de savoir de quoi il parle. Parce qu’un bon acteur c’est comme un bon cheval, c’est des pur-sang ce monde-là. Fait que si tu les montes mal, tu vas débarquer. Alors ça s’apprend. Oui sur le tas parfois, mais vaut mieux apprendre dans des ateliers. (…) Il vaut mieux mettre un maximum de chances de son côté pour qu’un jour, lorsqu’on dirige un acteur, il y ait quelque chose qui se passe, qui nous démarque du reste. »
— Charles Binamé
« Ce qui est le plus important pour être réalisateur, c’est l’imaginaire : cultiver, creuser, approfondir, triper dans notre tête. Après ça, notre travail, c’est de prendre cet imaginaire et de l’incarner. Tout le reste, ça s’apprend. »
— Louis Choquette
« On peut devenir fou à ne jamais pouvoir tourner. Le rôle du réalisateur qui se conduit comme un auteur est menacé de toutes parts, car qui veut engager des millions de dollars pour permettre à un quidam de raconter une histoire d’un certain point de vue ? Pourquoi donc ne pas raconter l’histoire, tout simplement? Qui a besoin d’un point de vue ? Le point de vue est source de trouble, on le maquille, on le camoufle jusqu’à ce qu’il n’en reste plus rien. On sort régulièrement le réalisateur de la salle de montage, parce que c’est là, devant les images montées, que les producteurs, les diffuseurs et les distributeurs regardent sans voir. »
— Paule Baillargeon
« La première grande qualité d’un réalisateur, c’est la santé parce que c’est tellement exténuant comme travail qu’il faut être en santé. Ce n’est pas pour rien que Jean Beaudin fait une heure et demie de marche intensive par jour. Donc, occupez-vous de votre santé, faites de l’exercice, mangez intelligemment. Ça paraît drôle de dire ça, mais autrement, on pète. Deuxième chose, croyez en ce que vous voulez faire parce que la deuxième plus grande qualité ce n’est pas la ténacité, c’est la capacité d’accepter les divergences d’opinions parce qu’il va y avoir des dizaines de personnes sur votre chemin pour vous faire douter. Alors, apprenez à vous faire confiance et à être têtu, ce qui ne veut pas dire être souple, mais têtu par rapport à ses convictions parce que sans ça, on peut se diluer facilement. »
— Robert Favreau